Notre Cabinet a pu obtenir une intéressante décision requalifiant un licenciement pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse (abusif).
Par un jugement du 23 novembre 2017, le Conseil des prud’hommes de PERIGUEUX a considéré que l’employeur d’un salarié déclaré inapte par le médecin du travail était responsable de l’inaptitude et, par conséquent, a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Un salarié d’une entreprise de maintenance informatique en région parisienne subit un accident domestique.
A la reprise du travail, le médecin du travail le déclare apte avec réserve et notamment limitation ou interdiction de monter des escaliers et de porter des charges lourdes.
L’employeur explique au salarié qu’il doit continuer à travailler comme auparavant s’il veut avoir une chance de conserver son poste.
Le salarié travaille, monte des escaliers quotidiennement, transportent des écrans (cathodiques), des imprimantes… et chute sur son lieu de travail en transportant précisément une imprimante.
Le Conseil des prud’hommes de PERIGUEUX retient que :
« (…) Il appartient à l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat lui imposait notamment de prendre en compte les propositions du médecin du travail, conformément aux prescriptions de l’article L4 624-1 du code du travail, de justifier des mesures d’aménagement de poste qui devait être mis en œuvre dès le mois de janvier 2011 [date de la reprise et de l’avis du médecin déclarant le salarié apte avec réserve].
Or, sur ce point, la société EOF se contente de procéder par voie d’affirmation, en soutenant avoir mis en œuvre les mesures préconisées, sans toutefois produire le moindre justificatif, qu’il s’agisse entre autres d’un rapprochement avec le médecin du travail pour définir plus précisément la nature des aménagements nécessaires ou encore d’une information du CHSCT dans le cadre des dispositions de l’article L4 612-11 du code du travail, notamment après l’avis d’aptitude avec réserves du 12 juillet 2011, alors que [le salarié] s’était vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé le 21 mars de la même année.
L’employeur n’allègue en outre aucune cause étrangère exonératoire, imprévisible et irrésistible.
(…) Il doit être considéré qu’en ne prenant pas en compte les prescriptions du médecin du travail qui lui imposait d’aménager le poste [du salarié], l’employeur a commis un manquement à son obligation de sécurité de résultat.
Dès lors, se trouve privé de cause réelle et sérieuse de licenciement intervenu en conséquence de l’inaptitude au poste occasionné à la suite de l’accident du travail survenu le 22 août, dans un environnement de travail qui n’avait pas fait l’objet des aménagements spécifiques adaptés à l’état de santé du salarié, tels que définis par le médecin du travail dans ses avis d’aptitude avec réserves (…) ».
Le salarié avait une ancienneté de 35 ans.
Le Conseil condamne l’employeur à lui payer des dommages et intérêts à hauteur de 50 000,00 € outre 1 500,00 au titre des frais d’Avocat.
La Cour d’appel de BORDEAUX a confirmé cette décision et a augmenté les dommages et intérêts alloués au salarié en les portant à la somme de 60 000 € dans un arrêt du 25 novembre 2020 :
» Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu’il a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement intervenu en conséquence de l’inaptitude au poste occasionnée à la suite d’un l’accident du travail survenu le 22 août 2012, dans un environnement de travail qui n’avait pas fait l’objet des aménagements. spécifiques adaptés à l’état de santé du salarié, tels que définis par le médecin du travail dans ses avis d’aptitude avec réserve des 5 janvier et 12 juillet 2011. »