A de nombreuses reprises notre Cabinet a eu à connaître de situations démontrant que la gestion des effectifs « à l’économie de personnel » était chronique dans les résidences accueillant nos ainés, qu’il s’agisse de résidences privées ou publiques.
En 2015, notre Cabinet avait ainsi été saisi par la directrice d’une résidence appartenant au groupe KORIAN. Elle s’était battue seule pendant plusieurs années pour essayer de maintenir une qualité de vie la meilleure possible pour les résidents. Après plusieurs années de combat, elle avait succombé à la dépression. La Cour d’appel de Bordeaux a su relever les carences managériales chroniques de la part de l’employeur… Carences qui, en réalité, résultaient d’une volonté de fonctionner à l’économie (CA Bordeaux, ch. soc. sect. a, 11 déc. 2019, n° 17/04249. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CA/Bordeaux/2019/C007E34449CC13E276BD8).
Ainsi la Cour indique-t-elle pu relever que : « En outre, Mme X établit que son employeur, ce que ce dernier ne contredit d’ailleurs pas dans ses conclusions, ne lui a pas fourni pendant plus d’un an l’assistance de deux collaborateurs clés, formés en ‘management’, en appui de la direction et étant en capacité de prendre le relais, le cas échéant, en l’absence du directeur. Elle prouve ainsi qu’elle a dû assumer seule le travail de directrice et de manager, sans être assistée de deux collaborateurs clés pendant plus d’un an à la suite du départ pour inaptitude professionnelle de l’infirmière collaborateur clé, Mme B C. Cette dernière, qui a été en 2011 et 2012 la plus proche collaboratrice de Mme X confirme d’ailleurs les conditions de travail dégradées au sein de la résidence de retraite ‘Le Moulin de L’I ainsi que les allégations de Mme X aux termes desquelles cette dernière était donc seule en charge de l’établissement en 2013, ce qui a entraîné irrémédiablement une hausse significative de ses heures de travail et une surcharge de son travail de manière durable l’ayant mise dans un état dépressif réactionnel. Il convient, enfin, de relever que Mme B C est elle-même partie pour déclaration d’inaptitude en juillet 2013 et que l’employeur ne verse aux débats aucun élément permettant de considérer qu’il a pris des décisions effectives de renforcement de moyens humains, notamment en termes de ‘management’, au sein de la résidence de retraite ‘Le Moulin de l’I’ dirigée par Mme X. »
Sur le plan du droit du travail, la Cour en conclut que le licenciement pour inaptitude résulte en fait de la faute de l’employeur et qu’il se trouve, de ce fait, dépourvu de cause réelle. Concrètement, le licenciement est donc injustifié.
« Dès lors, le comportement fautif de l’employeur ayant été directement à l’origine de la détérioration de l’état de santé et de l’inaptitude de Mme X, il convient d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande de requalification de son licenciement par cette dernière et de dire, de manière subséquente, que le licenciement de Mme X est dépourvu de cause réelle et sérieuse ».